Effets d’un bombardement
Hôpital Militaire
Premières sépultures
Une page d ‘ histoire
Septembre 1914
Samedi 5 septembre 1914
5 heures
Au moment de quitter Sézanne pour Romilly, où va s’installer le quartier général de la 5ème armée française, son nouveau commandant, le général Franchet d’Esperey, prend connaissance de l’ordre n°6 du général en chef, le futur maréchal Joffre, daté de la veille au soir, 22 heures.
» Toutes dispositions prises dans la journée du 5 pour passer à l’attaque le 6… «
» La 5ème armée sur le front général Courtacon, Esternay, Sézanne, prête à attaquer dans la direction du sud-nord…, le corps de cavalerie… assurant la liaison entre l’armée anglaise et la 5ème armée… «
En quelques formules lapidaires, le Haut Commandement a ainsi désigné à la 5ème armée sa place dans l’ordre de bataille et son front d’attaque : l’actuelle route nationale n° 4.
C’est seulement depuis l’avant-veille au soir que le général Franchet d’Esperey (futur maréchal de France, lui aussi) – succédant au général Lanrezac – se trouve à la tête de la 5ème armée, dont il commandait précédemment un corps d’armée (le 1er).
Cette armée est » celle qui, depuis le début de la campagne, a porté le poids le plus lourd de fatigues et de combats » (Cartier (R.), op. cit., (Cf. Biographie).)
Durement éprouvée le 22 août, à Charleroi, elle y a évité de justesse l’encerclement; ayant pris l’avantage le 29 août, à Guise, elle a néanmoins dû se conformer à l’ordre de repli lancé à l’ensemble des troupes françaises et britanniques.
Depuis lors, elle manœuvre en retraite, talonnée, de jour comme de nuit, par la 1ère armée allemande du général von Kluck, lequel, enivré par ses premiers succès, croit tenir la victoire à portée de main.
Par une chaleur accablante, manquant cruellement d’eau, de vivres, de sommeil, les corps d’armée s’étirent en d’interminables colonnes au long des routes de Champagne et de Brie – coupant parfois à travers champs – dans l’épaisse poussière soulevée par le piétinement des hommes et des chevaux, par le roulement de centaines de canons et de véhicules de toutes sortes.
Cette armée, au bord de l’épuisement, est, de surcroît, profondément ébranlée par la purge qui vient de s’abattre sur plus de la moitié de ses cadres supérieurs (commandants de corps d’armée et de divisions), auxquels le Haut Commandement impute, au moins en partie, les revers de la » bataille des frontières « .
Les directives reçues ce matin du Grand quartier Général prennent d’autant moins au dépourvu le général Franchet d’Esperey qu’il a activement participé à leur élaboration (Lors de l’entrevue qu’il a eue la veille, à la mairie de Bray-sur-Seine, avec le général Wilson, adjoint du maréchal French, commandant en chef du corps expéditionnaire britannique (Cf. Grasset (Colonel A.), op. cit., pp. 50-58).). Néanmoins, la fixation de la ligne de départ de la contre-offensive sur l’axe Courtacon-Sézanne est en légère contradiction avec ses propres instructions de la veille au soir, qui prescrivait au corps de cavalerie, couvrant son aile gauche, de se porter dans la région de Provins et au reste de l’armée de s’établir sur une ligne orientée du sud-ouest au nord-est, passant par Voulton, Beauchery, Louan, Nesles-la-Repose et Sézanne.
Sachant, cependant, qu’à sa gauche, le » corps expéditionnaire britannique » n’a pas encore effectué le mouvement en avant qui doit combler le vide créé par sa retraite accélérée des jours précédents, le commandant de la 5ème armée juge préférable de maintenir les cantonnements prévus par lui pour la soirée, non pas sur l’actuelle RN 4, mais à une douzaine de kilomètres au sud de celle-ci.
12 heures 30.
La 5ème armée poursuit sa retraite, de plus en plus harassante pour les troupes, qui se sont remises en marche vers minuit, mais de moins en moins inquiétée par l’ennemi.
Dans les états-majors comme dans les unités, la nouvelle commence à se répandre que cette journée marquera la fin du recul et que la contre offensive ne saurait tarder. (Au 3ème corps, ce sont les deux » divisionnaires » (général Mangin pour la 5ème division, général Pétain pour la 6ème division) qui, partis à cheval au devant de leurs unités en retraite, leurs diffusent eux-mêmes la nouvelle.)
18 heures.
Les grandes unités dont se compose la 5ème armée (Cf., dernière page, le » Tableau des forces en présence « .) ont maintenant atteint leur zone de stationnement et pour la plupart, s’y sont solidement retranchés.
À l’ouest de Cerneux, les têtes de colonnes des Iie et IVe corps allemands d’active se sont arrêtés un peu au-delà de la route nationale, sans s’y retrancher; elles bénéficient de l’appui du corps de cavalerie qui lance de hardies reconnaissances vers le sud.
Quant aux fantassins des IIIe et Ixe corps allemands, qui occupent la zone s’étendant de Cerneux à Esternay, ils ont, sans perdre un instant, empoigné pelles et pioches et commencé à creuser, sur dix kilomètres, en bordure de la même route, une tranchée de deux mètres de profondeur.
18 heures 30
L’ordre d’attaque du général Franchet d’Esperey est expédié aux corps d’armée. Il débute ainsi :
» Demain, 6 septembre, la 5e armée française attaquera la 1re armée allemande, tandis que l’armée anglaise et la 6ème armée l’attaqueront sur son flanc et menaceront sa retraite… «
et se termine par cette exhortation :
» Il importe que chaque soldat sache, avant la bataille, que l’honneur de la France et le salut de la Patrie dépendent de l’énergie qu’il va apporter au combat de demain. Le pays compte que chacun fera son devoir… «
23 heures
La nuit a surpris pas sa fraîcheur, après la canicule des jours précédents. Elle est et demeurera calme sur l’ensemble des positions tenues par la 5ème armée, hormis, dans le lointain, quelques tirs isolés.
Mais cette nuit de repos est aussi une veillée d’armes, car chacun sait qu’au lever du jour, on devra se remettre en marche, vers le nord, cette fois… dans la mesure où l’ennemi, dont les avant-postes ne se trouvent qu’à quelques kilomètres, n’aura pas lui-même repris l’offensive.
Ce qu’on ne sait pas encore dans les rangs de la 5ème armée, c’est qu’au nord de Meaux, à Saint-Soupplet et Monthyon, des éléments de la 6ème armée française sous les ordres du général Maunoury, ont déjà engagé le combat avec le IVe corps de réserve de la Ière armée allemande, placée en flanc-garde devant Paris.
Ce qu’on ignore aussi du côté français, même au niveau des états-majors, c’est que, vers 22 heures, le général von Kluck, commandant cette Ière armée, averti du danger qui le menace sur sa droite, a donné l’ordre à quatre de ses corps d’armée, parvenus au sud du Grand-Morin, d’arrêter la poursuite et de se replier au nord de la Marne, à l’exception du IXe corps, qui a pour instruction de rester en place pour le moment.
Ainsi, les avant-gardes allemandes, qui, vers le milieu de l’après-midi, ont atteint et même dépassé l’actuelle RN 4, doivent-elles instantanément se muer en arrière-garde.
Dimanche 6 septembre
6 heures.
À l’ouest du front de la 5ème armée, le corps de cavalerie a quitté avant l’aube ses cantonnements des alentours de Provins. Son chef, le général Conneau, a installé son poste de commandement à Chenoise, où il garde comme réserve les quatre escadrons du régiment de spahis marocains, dont le renfort vient de lui parvenir; il place en 1re ligne, à gauche, sa 8e division (général Gendron) et, à droite, la 10e division (général Grellet).
Bordant cette division à l’est, les avant-gardes du 18e corps (dont le commandant, le général Maud’huy, s’est établi au château du Houssay, avec une antenne à Flaix) sont en place sur la ligne Rupéreux, Flaix, Villiers-Saint-Georges, tandis que le gros des divisions demeure retranché à quelques kilomètres au sud.
Plus à l’est, le 3e corps du général Hache est en situation de déboucher de la ligne Brasseaus, Saint-Genest, les Essarts-le-Vicomte.
En deuxième ligne, le général Valbrègue, commandant le 4e groupe de division de réserve, a placé ses deux divisions derrière les 18e et 3e corps.
9 heures
Depuis une heure déjà, le corps français de cavalerie a opéré sa jonction avec la cavalerie britannique, qui vient ainsi combler la brèche que la retraite accélérée du » corps expéditionnaire » avait ouverte entre les 5e et 6e armées françaises.
Dès 8 h 30, le gros du 18e corps a rejoint ses avant-gardes sur la ligne Rupéreux, Flaix, Villiers; de là, il lance de fortes reconnaissances en direction de l’Aubetin.
Au 3e corps, enfin, tandis que la 5e division (général Mangin) progresse vers Courgivaux, la 6e division (général Pétain) vient d’atteindre sans encombre la ligne Saint-Bon, Villouette
11 heures.
Les patrouilles du corps français de cavalerie ne sont pas allées très loin, vu l’état des chevaux, mais ont pu se rendre compte que, de ce côté (à l’ouest de Cerneux), l’ennemi n’est pas en force.
Il n’en va pas de même sur le front du 18e corps (à l’est de Cerneux); des reconnaissances lancées depuis le début de la matinée, il ressort que des forces ennemies considérables ont passé la nuit au nord de l’actuelle RN 4 et que, tout au long de celle-ci, elles occupent des positions amplement garnies d’artillerie et reliées entre elles par une tranchée continue.
Il est donc clair maintenant que l’ennemi a cessé d’avancer et qu’il s’accroche au terrain. Toutefois, vers 10h, l’aviation a signalé au Q. G. de la 5e armée avoir aperçu dans les environs de Montmirail et de Montceaux-lès-Provins, de longues colonnes de troupes remontant vers le nord : peut-être l’amorce d’un mouvement de retraite ?
12 heures.
À l’est, le développement de l’action amène le 3e corps à se scinder en deux : tandis que la 5e division du général Mangin se trouve agir en liaison étroite avec le 1e corps, qui se dirige droit vers le nord, la 6e division du général Pétain, qui vient d’occuper la ferme de Champfleury, infléchit sa marche vers l’ouest, afin d’appuyer l’attaque – que prépare le 18e corps – de la position allemande de Monceaux-lès-Provins.
14 heures 15.
La 6′ division se lance à l’attaque de la voie ferrée de Provins à Esternay; la gare de Montceaux est enlevée à la baïonnette.
15 heures 45.
A l’ouest, l’avant-garde du corps de cavalerie fait savoir qu’au lieu de la marche en avant escomptée, qui devait la faire opérer sur les arrières des positions allemandes, elle a dû se replier sur Fontaine-Yot, devant un mouvement offensif de l’ennemi, qui, ayant enlevé Courtacon, canonne vigoureusement Champcenest, faisant ainsi craindre une attaque sur le flanc gauche du 18e corps, par le sud du bois des Marets. Cette menace ne se réalisera pas, mais le corps de cavalerie tout entier en restera paralysé pour le restant de la journée; seule reste active l’artillerie de la 10e division de cavalerie, qui tire sur Cerneux et Sancy.
16 heures 30.
Montceaux-lès-Provins, que l’artillerie du 18e corps bombarde depuis plusieurs heures, est maintenant sous le feu de plus de deux cents pièces, relevant de trois corps d’armée différents, parmi lesquelles les canons du groupe d’artillerie lourde du 1er corps, qui écrasent de leurs obus, à la lisière ouest du village, une forte batterie allemande repérée dès le matin, grâce à l’avion dont dispose le colonel Estienne ( » Apôtre de l’aviation d’artillerie » avant la guerre, il sera, un peu plus tard l’ » apôtre des chars de combats » (cf. Isselin H., op. cit., p. 267, note 23).), commandant l’artillerie de la 6e division.
Le clocher de l’église, qui, dominant toute la région alentour, offre aux artilleurs allemands un observatoire de choix, est vite atteint, si bien que les canons subsistants, devenus aveugles, ralentissent bientôt leur tir, avant de se taire complètement.
Malgré cette intense préparation d’artillerie, l’attaque que l’infanterie du 18e corps vient de déclencher en direction de Montceaux se heurte à une grande ferme transformée en forteresse, truffée de mitrailleuses habilement camouflées, qui balaient de leurs rafales la route venant de Villiers-Saint-Georges.
Deux bataillons, se glissant, l’un le long des fossés de la route, l’autre par un ravineau montant de Champcouelle, tentent néanmoins d’avancer,… » mais le feu de l’ennemi est écrasant. Des milliers et des milliers de balles sifflent, claquent, ricochent… C’est un ouragan de mort. On rampe derrière les mottes de terre, dans les caniveaux, le long des plus petits fossés, par petits groupes, homme par homme, … et après avoir gagné ainsi peut-être une centaine de mètres, au prix de quels efforts, il faut tout de même bien s’arrêter quand, les derniers abris dépassés, on se trouve sur un terrain absolument découvert…
» Mais des tireurs ennemis ont été imprudents. Ils se sont montrés, sans doute pour voir l’effet de leur tir… « . Leurs mitrailleuses ainsi repérées,… » appel est fait à l’artillerie, dont les obus percutants ouvrent de larges brèches dans le mur d’enceinte de la ferme » (Grasset (Colonel A.), op. cit. p.103) Sous le feu des mitrailleuses qui tirent toujours, mais avec beaucoup moins de précision, la progression reprend.
Pendant ce temps, la 6e division (du 3e corps) est intervenue à l’est de Montceaux, où le général Pétain a donné pour objectif à l’une de ses brigades, sous le commandement du général Hollander, la ferme des Châtaigniers
» Sur ce terrain, véritable. glacis sans abri, les balles de mitrailleuses allemandes fauchent tout ce qui se lève « , sans compter que les assaillants sont pris en écharpe, sur leur droite, par d’autres mitrailleuses dissimulées dans les boqueteaux longeant l’actuelle RN 4.
» Sous cet ouragan d’acier, les pertes sont graves. À 17h 30, quand la ferme des Châtaigniers, en flammes, sera enlevée, la brigade Hollander aura perdu plus de 600 hommes » (Ibidem, p. 105)
20 heures
La nuit est déjà tombée lorsque les fantassins du 18e corps atteignent la lisière sud de Monceaux. L’ennemi s’est enfui, ayant vers 19 h, protégé sa retraite par une contre-attaque, fortement appuyée de mitrailleuses, effectuée à l’est du village, en direction des Châtaigniers.
22 heures.
Tandis qu’à l’est, le 18e corps bivouaque aux alentours de Montceaux et dans les décombres du village, et que le 3e corps a rejoint les positions conquises dans la matinée, d’où il pourra, demain matin, reprendre sa marche vers le nord, à l’ouest, par contre, le corps de cavalerie a dû repartir » chercher l’eau » autour de Provins, s’éloignant ainsi de sa zone d’opérations, et il n’est arrivé dans ses cantonnements que tard dans la soirée.
Lundi 7 septembre
4 heures 30.
L’artillerie allemande bombarde vigoureusement Montceaux-lès-Provins. Les éléments du 18e corps qui occupent le village en ruine se préparent à résister à une contre-attaque, qui ne viendra pas.
6 heures.
Au 3e corps, la 6e division doit faire face, devant Champfleury, à une attaque de peu d’envergure, qui est rapidement repoussée.
7 heures.
Les trois divisions du corps français de cavalerie, qui ont quitté, à l’aube, leurs cantonnements proches de Provins, occupent maintenant les emplacements qui leurs ont été assignés, de la lisière nord de la forêt de Jouy à Courchamp, en passant par Saint-Hilliers, où le général Conneau a établi son P.C.; elles lancent, de là, des détachements de découverte au-delà de l’Aubetin.
Mais voici que, de ce côté, l’ennemi reprend encore une fois l’initiative : un » gros de cavalerie « , débouchant de Courtacon, tente, par le bois des Marets, de se glisser entre la 10e division de cavalerie et le 18e corps. Ce mouvement est vite enrayé par l’artillerie, mais Champcenest et le bois des Marets restent occupés par les cavaliers allemands.
Le 18e corps, parti de la ligne Rupéreux, Montceaux-lès-Provins, a pour objectifs Augers, Cerneux et Sancy. Il progresse lentement, se couvrant sur sa gauche afin de contrecarrer toute nouvelle entreprise ennemie en provenance du bois des Marets, mais ne rencontre aucune résistance.
8 heures 30.
Un aviateur, qui vient de faire une reconnaissance devant le corps français de cavalerie, signale que depuis 7 h, de nombreuses et importantes colonnes allemandes se dirigent vers le nord.
L’avant-garde de la 10e division de cavalerie ne découvre aucun ennemi dans les bois du Buisson et des Marets et seulement quelques blessés (des soldats de la Garde à cheval du Kaiser) dans le village de Champcenest.
11 heures.
Un détachement du 18e corps pénètre dans Sancy, position puissamment organisée, mais vide de défenseurs; aucun Allemands, non plus, n’a été rencontré dans Angers et Cerneux.
12 heures.
Aucun doute n’est plus maintenant possible; les Allemands se retirent, alors que l’avance anglaise se confirme sur l’aile gauche de la 5e armée française. Le général Franchet d‘Esperey donne, en conséquence, pour nouvel objectif à ses corps d’armée le Petit Morin, » rivière de Montmirail « .
Durant la matinée, le corps de cavalerie a lentement progressé vers l’Aubetin. L’avant-garde de la 10e division vient d’arriver à Courtacon, qui a durement souffert de sa brève occupation par la cavalerie de la Garde et que l’artillerie allemande tient encore sous son feu, empêchant le franchissement de la rivière. La 8e division, qui a atteint l’Aubetin à Fortail, ne peut, elle non plus, déboucher.
La 4e division, qui a rencontré les Anglais à Frétoy, traverse l’Aubetin sans difficulté à Beton-Bazoche et glisse son avant-garde vers le Bois-Saint-Père, prenant à revers les derniers éléments de la Garde, qui refluent précipitamment vers le nord : la voie est ainsi ouverte au corps français de cavalerie vers La Ferté-Gaucher.
Au 3e corps, les deux divisions, de nouveau au coude-à-coude, avancent de conserve vers le nord, la 5e division ayant, dès 9 h 30 chassé de Courgivaux les dernières patrouilles ennemies.
14 heures 15.
Les divisions du 18e corps, ayant reçues l’ordre de poursuite, se remettent en marche vers le nord.
20 heures.
Le général Maud’Huy installe à Saint-Martin-du-Boschet le P.C. du 18e corps, dont les avant-gardes bivouaquent de part et d’autre du Grand-Morin. Le 3e corps, dont le P.C. est à Neuvy, s’est également établi des deux côtés de cette rivière, au sud de laquelle vient d’arriver le corps français de cavalerie.
Mardi 8 septembre.
6 heures
Alors que, du fait du repli allemand, la bataille s’éloigne du Provinois – mais redouble d’intensité en Champagne (dans la région des Marais de Saint-Gond, sur le front tenu par la 9e armée du général Foch) – le général Franchet d’Esperey, confiant dans l’issue des opérations en cours, fait accélérer les préparatifs de départ du Q.G. de la 5e armée, qui, dans l’après-midi, se transportera de Romilly à Villiers-Saint-Georges.
11 heures.
Le corps français de cavalerie, qui n’a guère fait que suivre le repli de la cavalerie allemande, s’aligne sur l’armée britannique, qui vient de bousculer cette cavalerie et de la rejeter sur la Marne.
Tout le long du Petit-Morin, les 18e, 3e et 1er corps entrent en contact avec les forces ennemies, qui paraissent décidées à leur en interdire le passage.
17 heures.
De retour à son Q.G. de Villiers-Saint-Georges, le général Franchet d’Esperey – préoccupé par les difficultés que rencontrent ses corps d’armée, ainsi que, sur leur droite, la 9e armée du général Foch, en butte aux furieux assauts de la IIe armée allemande (général von Bülow) – est réconforté par de bonnes nouvelles : l’armée britannique a fait un bon en avant de 20 km, qui a conduit ses trois corps d’armée sur le Petit-Morin et, surtout, le 18e corps a réussi à percer le front allemand à Marchais-en-Brie, ouvrant ainsi dans le dispositif ennemi, centré sur Montmirail, une brèche qui s’élargit d’heure en heure.
Mercredi 9 septembre
12 heures.
Apprenant que ses troupes viennent d’enlever Montmirail, le général Franchet d’Esperey ordonne d’y transférer, sans plus attendre, le Q.G. de la 5e armée, qui retournera néanmoins ce soir à Villiers-Saint-Georges.
19 heures
Rentré à Villiers-Saint-georges, le général Franchet d’Esperey y trouve son état-major en ébullition devant les perspectives qu’offrent la dislocation du dispositif allemand. Mais un fait domine la situation : l’incontestable victoire des forces franco-britanniques.
Un officier de l’état-major présente un projet de proclamation au général, qui y change quelques mots et, avant de signer le texte, la date par anticipation de Montmirail, en souvenir de la victoire remportée cent ans plus tôt par Napoléon sur Blücher.
Sans omettre de rendre aux combattants de la 5e armée l’hommage de reconnaissance qui leur est dû, cette proclamation, se gardant d’un triomphalisme excessif, est empreinte d’une prudence prémonitoire : » …Ce premier succès n’est qu’un prélude. L’ennemi ébranlé n’est pas encore complètement battu. Vous avez encore de dures épreuves à subir, de longues marches à faire, de rudes combats à livrer « .
Durant les quatre années qui vont s’écouler jusqu’à l’armistice du 11 novembre 1918, cette promesse sera amplement tenue.